Les politiques de lutte contre les discriminations

Manifestation anti-racisme à Glasgow, 2016 - © Alamy.com

Dans les pays d’immigration, l’existence d’importantes inégalités qui découlent de pratiques discriminatoires en raison des origines des personnes est un fait avéré, que montrent nombre d’enquêtes. Si la plupart de celles-ci se focalisent sur le monde du travail, des considérations analogues se font jour dans le milieu scolaire, mais aussi au sein de l’armée, pourtant réputée, à tort, comme imperméable à ce genre de problématiqueQK.

Les politiques européennes de lutte contre les discriminations

Longtemps après les États-Unis et le Royaume-Uni, à la fin des années 1990, l’Union européenne s’est dotée d’une législation spécifique en matière de discriminations : la directive 2000/43 « relative à la mise en œuvre du principe de légalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou dorigine ethnique », ainsi que la directive 2000/78 visant à créer « un cadre général en faveur de légalité de traitement en matière demploi et de travail ». Ces deux directives, promulguées en 2000 après l’émotion suscitée par l’entrée au gouvernement d’un parti d’extrême droite en Autriche, ont été par la suite transposées dans le droit national des États membres. Ces dispositions ont pour objectifs : a) d’étendre à tous les pays membres les acquis des démarches anti-discriminatoires existantes ; b) d’harmoniser les concepts en jeu ; c) d’exiger des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives »QK à l’encontre des auteurs de discriminations ; d) de faciliter l’accès à la justice des victimes (qui doivent faire face à des obstacles allant de la méconnaissance du droit au coût et à la lenteur de la justice, en passant par la peur de représailles) grâce à la possibilité de se prévaloir du soutien d’associations et d’ONG ; e) de donner aux victimes la possibilité de ne fournir, au moment de la dénonciation, que des éléments plausibles sur la discrimination subie, la preuve de non-discrimination incombant à l’accusé.

En reconnaissant que la « race », le sexe et l’origine peuvent constituer des motifs de discriminations dans le domaine de l’accès au travail, de la protection sociale, de l’éducation et des services publics (dont le logement), les directives susmentionnées ont le mérite de proscrire publiquement certaines attitudes, en créant une morale collective contraire aux discriminations.

Mais si les juristes sont en général satisfaits de ces avancées, les lois ne suffisent pas à elles seules à éradiquer les discriminations et montrent leurs limites en termes d’application.

Limites des dispositions anti-discriminatoires

En dépit de bonnes intentions, les mesures législatives contre les discriminations adoptées dans la plupart des pays d’immigration du « premier monde » donnent souvent lieu à des effets contreproductifs auxquels sont confrontées nombre d’associations à caractère juridique qui travaillent pour la défense des droits des immigrés : les victoires obtenues par les victimes devant les tribunaux permettent paradoxalement aux personnes ou organismes reconnus coupables de discrimination (notamment à l’État lui-même) de mieux contrer de nouvelles accusations. Les attitudes discriminatoires sont ainsi plus masquées et plus subtiles, tandis que des services juridiques spécifiques sont créés pour défendre les personnes accusées de discrimination.

Parallèlement, puisque les victimes, dans leur grande majorité, ne sont pas assistées systématiquement par des spécialistes, la question des discriminations présente des aspects subjectifs évidents. Les enquêtes psychosociales mettent en exergue à la fois des réactions de sous-estimation et de surestimation de la discrimination de la part des personnes qui s’en disent victimes. Dans les deux cas, ces comportements reposent, parfois implicitement, sur les conséquences supposées de la dénonciation : si d’aucuns estiment que dénoncer contribue à se rendre visible en tant qu’individu ou groupe stigmatisé, d’autres considèrent qu’il ne faut rien céder sur ce terrain.

En dépit de débuts prometteurs, les organismes publics mis en place pour lutter contre les discriminations dans pratiquement tous les pays de l’Union européenne ont constaté un faible taux de plaintes.

Au-delà des politiques officielles

Au vu d’une action publique jugée insuffisante (ou décevante) en matière de lutte contre les discriminations, une partie des victimes préfère aujourd’hui rallier des groupes de pression politique à caractère “ethnique” (nous utilisons les guillemets car il s’agit souvent d’organismes ou partis qui fédèrent les ressortissants de différentes nationalités et leurs descendants comme s’ils appartenaient à une même ethnie de « Noirs », « non-Blancs », « indigènes », etc.), qui proposent des projets plus radicaux, voire dans quelques cas utopistes.

Des sondages ont montré que de moins en moins de personnes se déclarent racistes ou discriminantes. Toutefois, beaucoup ne se rendent pas compte de leurs opinions/jugements autoréférentiels, autrement dit basés sur leur propre culture supposée universelle.

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