Migrants venus des Balkans à la station de Budapest en 2015 - © Council on Foreign Relations

Les mouvements migratoires

Si le fait de migrer caractérise depuis toujours l’espèce humaine comme la plupart du règne animal, durant l’ère contemporaine le phénomène migratoire a été le plus souvent lu à travers le prisme de l’économie capitaliste, qui a transformé la planète en un marché globalisé.

Selon les théories les plus anciennes sur les causes des mouvements migratoires, les migrations trouveraient leur origine dans l’existence, d’un côté, d’un pôle de départ où se trouveraient réunies les conditions défavorables au développement d’une vie normale (dites facteurs push, à savoir qui « poussent à partir »), et de l’autre, d’un pôle d’arrivée qui cumulerait un ensemble très attractif d’avantages (dits facteurs pull, c’est-à-dire qui « incitent à venir »), les migrants partant donc du pôle où il y a pléthore de main-d’œuvre pour aller équilibrer le pôle en manque de travailleurs.

Une vision aussi simpliste des causes de la migration a inspiré et continue d’inspirer nombre de prévisions mathématiques “inéluctables”, qui se révèlent ponctuellement inexactes. L’une des raisons de l’imprévisibilité des mouvements migratoires réside dans leur extrême variabilité, due à la liberté humaine, à la complexité des facteurs en jeu et au mouvement constant de ces derniers.

Plus les chercheurs se sont familiarisés avec le terrain des migrants et plus leurs théories sont devenues moins ambitieuses, moins généralistes et moins simplistes.

Si l’économie joue un rôle fondamental dans l’explication des flux internationaux de main-d’œuvre, elle ne suffit toutefois pas à expliquer pourquoi les migrants se déplacent d’un point bien déterminé du globe à un autre, pas plus qu’elle ne parvient à rendre compte des différences entre la migration masculine et la migration féminine ou à justifier l’ensemble des motivations de départ.

Les études migratoires les plus récentes ont essayé de réajuster les théories classiques sur la migration en explorant un certain nombre de pistes :

  1. la différentiation des raisons de départ selon le genre des migrants ;
  2. la prise en compte des biographies ou des récits des protagonistes de la migration pour montrer que les motivations de départ de chaque individu sont multiples et imbriquées ;
  3. l’existence d’un « capital migratoire » ou d’un « savoir migrer », ou, en d’autres termes, d’un ensemble de ressources matérielles et spirituelles permettant à une personne d’entreprendre l’aventure migratoire ;
  4. l’observation des cycles historiques ;
  5. l’existence de « catalyseurs » de la migration, d’éléments déclencheurs des mouvements de populations sur la base d’une situation favorable à la migration ;
  6. la perspective de la « mondialisation », qui accélère l’évolution des phénomènes et juxtapose physiquement les populations et les civilisations.

Dans la recherche sur les causes de la migration, certaines approches peuvent fausser les résultats. Premièrement, il ne faut pas trop se fier aux catégories employées par les différents pays d’immigration pour subdiviser les types de permis de séjour ; en effet, un migrant peut ainsi entrer officiellement dans un pays dans le cadre d’un regroupement familial, alors que les raisons réelles de sa migration peuvent être en réalité fort différentes. Deuxièmement, même les enquêtes de terrain réalisées à partir d’interviews n’obtiendront généralement que les informations que les migrants voudront bien donner sur leur vie, selon le degré de confiance établi avec le chercheur.

Plus la migration s’effectue dans des conditions difficiles, voire extrêmes, moins la seule motivation économique suffit à l’expliquer : la “gravité” des raisons pour entreprendre l’aventure migratoire peut être mesurée sur la base des risques encourus pour l’entamer.

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