Le statut de réfugié dans une perspective internationale

Camp de réfugiés à Dadaab, au Kénya - © DigitalJournal.com

Au-delà de la France, la fermeture des frontières

Les États riches sont obnubilés par la question du contrôle des flux migratoiresQK. Dans le contexte de ce que, par commodité de langage, il est convenu d’appeler « la crise », la xénophobie fait des ravages, et l’étranger est perçu comme cause première ou aggravante des problèmes sociaux. Le processus de la construction européenne et les phénomènes liés à la mondialisation poussent une partie considérable des sociétés à s’inquiéter de la préservation de leur “identité nationale”, qui, d’ailleurs, n’est jamais clairement définie, même si l’étranger est de plus en plus regardé comme une menace à cette identité. Les gouvernements se lancent dans des politiques de contrôle de plus en plus accru des migrations.

La tendance des États est alors d’aborder les mouvements de réfugiés dans le contexte du contrôle des flux migratoires et non plus comme étant, avant tout, une question liée à la défaillance des mécanismes de la protection nationale du pays d’origine, qui doit être palliée indépendamment des politiques migratoires générales. La protection des réfugiés est un devoir des États-nations face à des problèmes engendrés par leur existence même. La politique d’immigration, tout aussi liée à l’action des États, relève d’autres considérations, car le mécanisme de la protection juridique nationale n’est pas défaillant, au moins formellement.

Après avoir accepté par un acte souverain d’accorder, dans la quasi-totalité des cas, un asile stable aux personnes qu’ils ont reconnues comme réfugiées selon la convention de Genève, les États européens cherchent souvent à se dégager de leurs obligations en matière de séjour des réfugiés que leur imposent leurs engagements internationaux (le non-refoulement), combinés aux dispositions figurant dans leurs lois nationales (délivrance aux réfugiés d’un titre de séjour stable).

Pour contourner le principe du non-refoulement, les États tentent de prévenir l’arrivée des réfugiés sur leur territoire, entre autres au moyen de la notion de « pays tiers sûr » qui engendre de véritables « chaînes de renvoi », aboutissant souvent au pays d’origine.

Pour neutraliser les dispositions nationales qui prévoient la délivrance d’un titre de séjour stable aux réfugiés reconnus, les États se livrent à une lecture restrictive de la définition figurant à la convention de Genève et rejettent les demandes de statut à tour de bras. Ainsi l’asile territorial de facto ou la protection subsidiaire éventuellement accordée à ceux auxquels le statut de réfugié a été refusé sont-ils alors précaires et au moins partiellement déconnectés des mécanismes de la protection internationale et des obligations fixées par la convention de Genève, qui, si elles ne portent pas sur le séjour lui-même, abordent pratiquement tous les aspects de la vie sociale.

Craignant de voir s’accroître le nombre des réfugiés frappant à leurs portes, les États riches sont allés jusqu’à s’en prendre à la souveraineté même des États-nations en instituant, dans des pays troublés par des conflits internes (par exemple la Yougoslavie en voie de désagrégation), des « zones de sécurité » contrôlées par des forces étrangères placées sous le drapeau des Nations unies. Ces zones deviennent inévitablement des enjeux de politique internationale, avec tout ce que cela peut signifier comme menace pour la sécurité des réfugiés qui s’y trouvent.

Enfin, avec les mêmes objectifs, les États inventent la notion d’ « asile dans une partie non troublée » du pays d’origine. Le HCR, sans s’opposer de front à cette notion, a soumis son application à des conditions difficiles à remplir. Toutefois, les recommandations du HCR ne sont pas contraignantes pour les États...

L’asile et le statut de réfugié dans les conventions de Schengen et de Dublin

Paradoxalement  rien qu’en apparence, sans doute  c’est dans un tel contexte de déconnexion de l’asile territorial des mécanismes de la protection internationale que les États de l’Union européenne établissent un lien entre l’asile et le statut de réfugié. En effet, les conventions de Schengen et de DublinQK définissent, dans des termes très proches, la « demande d’asile » comme étant la requête de protection au titre de réfugié selon la convention de Genève.

Ces conventions imposent à l’État considéré comme responsable du traitement de la demande d’asile (donc, selon la définition, de statut de réfugié) de l’examiner selon ses procédures nationales. En principe, pour ce faire, l’État responsable devrait admettre le demandeur sur son territoire le temps nécessaire à l’étude du dossier. On pourrait y voir une petite égratignure au principe de souveraineté nationale en matière d’autorisation de séjour. Toutefois, les deux conventions rappellent que les États, dans le cadre de leurs dispositions nationales et dans le respect de leurs engagements internationaux, peuvent renvoyer les réfugiés vers des pays tiers. Elles laissent également à chaque État tant la possibilité de prendre à son compte l’examen d’une demande dont un autre État serait le responsable que celle d’examiner une quelconque demande d’asile, même si elle n’est pas formulée au titre de la convention de Genève. Ces deux conventions se contentent d’imposer aux États signataires que l’un d’entre eux soit clairement chargé de décider du sort d’un demandeur de statut de réfugié.

En résumé, les États conservent la maîtrise de l’octroi de l’asile. Ils ne sont partiellement limités que par l’obligation internationale de non-refoulement et par leurs propres législations nationales en matière de séjour des réfugiés reconnus, législations qu’ils peuvent modifier à tout moment de façon souveraine. En fin de compte, demeure intact le principe selon lequel l’État admet qui il veut sur son territoire.

Selon le HCR, à la fin de 2014 il y avait dans le monde environ 16 700 000 réfugiés placés sous son mandat. À ces personnes s’ajoutent quelque 5 000 000 de réfugiés placés sous le mandat de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).

Enfin, on évalue à 1 000 000 le nombre de demandeurs d’asile dans le monde.

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