La colonisation de l’Afrique

Visite d'autorités belges dans le camp militaire Albert à Leopoldville (Kinshasa) - © Fotomaps.ru

Bordée sur ses côtes méditerranéennes par de redoutables empires musulmans et avec un territoire subsaharien quasiment inconnu, jusqu’au XIXe siècle l’Afrique n’intéresse les Européens que pour le commerce des esclaves en direction des Amériques et comme lieu de passage des marchandises entre les océans Indien et Atlantique.

Mais durant le XIXe siècle, la donne change. Les Amériques sont pratiquement devenues indépendantes et l’esclavage est progressivement aboli. Parallèlement, l’Empire ottoman et le royaume du Maroc sont en déclin. Le continent noir offre alors des perspectives pour devenir le terrain idéal pour la colonisation : il est peu peuplé, peu développé et il renferme d’énormes richesses. Dans leur désir de conquête, les puissances européennes devront veiller à ne pas entrer en conflit entre elles, en édictant des règles pour le partage du continent.

La colonisation de l’Afrique du Sud

En 1652, des paysans néerlandais appelés boersQK s’emparent de l’avant-poste portugais du Cap, et s’y installent avec leurs familles, exploitant le travail d’esclaves noirs.

En 1820, les Anglais font leur apparition au Cap, imposant leur domination et abolissant l’esclavage. Le ressentiment des Boers à l’encontre des envahisseurs trouve son point d’orgue en 1835, lorsque 15 000 d’entre eux, menés par Piet Retief, entament une « grande migration » (Grote Trek), quittant la colonie du Cap pour se diriger vers le Nord-Est, au-delà de la rivière Orange, afin d’être indépendants et d’atteindre la « terre promise ». Mais l’intérieur des terres où se rendent ces Voortrekkers est habité par les Zoulous et d’autres tribus, et une centaine de Boers sont massacrés avant que les Boers ne déciment l’armée zouloue (bataille de Blood River). Les Boers fondent alors trois républiques : Orange (capitale Bloemfointein), Transvaal (capitales Johannesburg et Pretoria) et Natal (capitale Durban). Ces États n’auront qu’une brève existence, notamment à cause de la découverte des mines de diamants à la frontière entre les républiques des Boers et la colonie anglaise. Les Anglais annexent le Natal en 1842 et conquièrent les deux autres États boers en 1902.

La Conférence de Berlin

Si l’on excepte les nombreuses possessions côtières et la colonie du Cap détenues par les Anglais, et l’Algérie septentrionale, conquise par les Français à partir de 1830, les Européens ne mènent pas d’actions militaires à l’intérieur de l’Afrique pendant une bonne partie du XIXe siècle.

La colonisation africaine s’accélère en revanche à partir de 1880. Conscient des projets africains des autres nations du Vieux Continent et des contentieux liés aux plans de conquête du Congo, le Portugal, qui souhaite créer une vaste colonie allant de l’Angola au Mozambique, propose la tenue d’une conférence internationale de tous les pays intéressés par la colonisation de l’Afrique. Le chancelier allemand Bismark, soucieux de faire une « place au soleil » à l’Allemagne, accueille favorablement la demande du Portugal et, entre novembre 1884 et février 1885, organise dans la capitale allemande ce qui sera appelé la Conférence de Berlin ou du Congo en vue du partage de l’Afrique entre les puissances coloniales (Cf. la carte en cliquant ici). Y participent l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Belgique, le Danemark, l'Empire ottoman, l’Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie, la Suède-Norvège ainsi que les États-Unis. Les délégations se mettent d’accord sur les points suivants : a) toute puissance européenne installée sur la côte africaine peut étendre sa domination vers l'intérieur des terres jusqu'à ce qu’elle rencontre une « sphère d'influence » voisine  (un territoire sur lequel une autre puissance européenne a le droit de s’étendre); b) la prise de possession des territoires exige l’occupation de ceux-ci, tandis que les allégeances des indigènes doivent être notifiées aux autres puissances ; c) l’esclavage est interdit ; d) la plupart du Congo revient à la Belgique, mais ses rivières peuvent être utilisées à des fins commerciales par les autres Européens. Les participants à la conférence établissent également le découpage des zones susceptibles d’entraîner des conflits de propriété.

La conquête de l’Afrique

Après la Conférence de Berlin, en quelques décennies, la quasi-totalité de l’Afrique passe entre les mains des Européens. Les Anglais s’assurent un espace allant de l’Égypte à l’Afrique du Sud (à l’exception du Tanganyika allemand), et de vastes territoires en Afrique occidentale (Nigeria, Ghana, Sierra Leone et Gambie) ; les Français occupent l’Afrique occidentale jusqu’au Congo Brazzaville et s’emparent de Madagascar ; les Allemands envahissent le Togo, le Cameroun, le Tanganyika (Tanzanie), le Rwanda, le Burundi et la Namibie ; les Portugais élargissent leur domination sur l’Angola et le Mozambique et gardent leurs colonies de Guinée Bissau et du Cap-Vert ; les Espagnols maintiennent leur souveraineté sur le Rio de Oro (Sahara occidental) et la Guinée équatoriale ; les Belges prennent possession du Congo (aujourd’hui RDC) ; les Italiens s’adjugent la Libye et l’Érythrée.

Les conquêtes, parfois effectuées en jouant sur les rivalités entre les nations africaines, voient aussi parfois des épisodes de cruauté et même des génocides. Le plus connu est celui perpétré en 1904 par les Allemands en Namibie à l’encontre de la population Herero.

À la veille de la Première Guerre mondiale, seuls deux États africains sont indépendants : le Liberia et l’Éthiopie, ancien royaume dont le drapeau vert-jaune-rouge deviendra le symbole de la liberté de l’Afrique. La défaite de l’Allemagne à la fin du premier conflit mondial détermine le partage de ses colonies africaines au bénéfice de la France (Togo, Cameroun), de l’Angleterre (Tanganyika et Namibie) et de la Belgique (Rwanda et Burundi). L’Éthiopie, quant à elle, tombera entre les mains de l’Italie mussolinienne peu avant la Deuxième Guerre mondiale.

Le Liberia

Le Liberia naît d’une colonisation assez singulière. Au début du XIXe siècle, les États-Unis et les Îles des Caraïbes comptent un certain nombre d’esclaves noirs libérés que d’aucuns pensent difficilement intégrables à la société américaine. En 1817, un homme politique et un pasteur protestant de Virginie fondent la Société de colonisation américaine, dont le but est de donner une nouvelle patrie aux anciens esclaves noirs dans le continent africain.

En 1821, le projet est vite réalisé : la société convainc quelques centaines d’anciens esclaves de s’installer dans un petit territoire du Liberia acheté à un roi malinké. Malgré la résistance des indigènes, en 1842 une série de petites colonies d’Afro-Américains créent l’État du Liberia et font de Monrovia (nom donné en l’honneur du président des États-Unis James Monroe) sa capitale. La petite minorité d’Afro-Américains, culturellement très différents des Noirs autochtones, détiendra le pouvoir jusqu’à la moitié du XXe siècle.

Le cas libérien constitue l’exemple le plus visible du flux migratoire d’anciens esclaves vers l’Afrique durant la colonisation européenne.

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