De l’importance des mots pour désigner les mouvements de populations

Réfugiés, travailleurs immigrés, touristes, colonisateurs... - © Migral

Qu’il s’agisse de personnes fuyant des persécutions dans leur pays ou de personnes en quête de meilleures opportunités économiques, les médias et l’opinion publique utilisent très souvent pour les désigner, sans distinction aucune, le mot « migrants ». Parallèlement, les individus qui se rendent à l’étranger pour affaires ou à la demande de leur entreprise refusent d’être qualifiés de « migrants » et préfèrent se définir comme des « expatriés ». Essayons donc d’y voir un peu plus clair dans la multitude de vocables employés.

Migration du latin migratio, lui-même tiré de l’ancien slavon miglivu, “mobile” fait référence à un déplacement, individuel ou collectif, de personnes allant s’installer de manière durable ailleurs, quittant par conséquent l’endroit où elles étaient installées, celui-ci ne leur offrant plus, pour des raisons diverses, de perspectives d’avenir.

Expatriation, désigne l’éloignement (souvent volontaire) prolongé de quelqu’un de sa patrie sans que soient véritablement suggérées les raisons, les conditions, etc., mais en laissant supposer que ces dernières n’étaient pas trop liées à une situation difficile.

Itinérance du latin iter, chemin indique le déplacement structurel/systématique de personnes qui, en raison de leur profession sont contraintes par définition d’aller d’un endroit à un autre : forains, artistes de cirque, marins, transporteurs, commerçants ambulants, bergers transhumants, etc.

Nomadisme du grec nomàs, pâturant exprime le déplacement perpétuel et souvent récurrent d’une population s’installant en groupe pour de brèves périodes dans un endroit leur permettant d’y trouver des ressources. Afin de préserver ce mouvement et leur unité, les populations nomades essaient, en général, d’éviter de se mélanger aux habitants qu’elles rencontrent, mais en assimilant certains traits culturels.

Tourisme de plusieurs origines étymologiques probables ayant toutes la racine « Tur/Tour » signifiant « voyage, exploration, tour » désigne un voyage d’agrément à la découverte de lieux nouveaux pendant une période de courte durée bien définie.

Évacuation du latin e-vacuum, faire sortir jusqu’à vider ou déplacement forcé temporaire désigne le départ soudain et massif de populations vers l’endroit sûr le plus proche, le lieu d’origine étant provisoirement inaccessible ou dangereux.

Exil du latin exul, celui qui est hors (ex) de son sol ou siège (sol, sedes) désigne à l’origine la peine infligée à certains condamnés, contraints de quitter leur domicile ou pays. Au Moyen-Âge, on parlera plutôt de bannissement.

Déportation se réfère au déplacement forcé de populations, généralement vers l’étranger, infligé par des autorités hostiles exerçant un pouvoir sur elles en vu de les affaiblir et de mieux les contrôler.

Exode du grec ex-odos, sortie évoque le départ du peuple hébreu hors d’Égypte : le terme indique l’abandon massif d’un territoire par une population, abandon presque total, contraint par des circonstances extérieures,.

Diaspora du grec dia-speiro, disséminer signifie la dispersion d’un peuple dans différents endroits de la planète après que son lieu d’origine soit devenu inaccessible. La diaspora paradigmatique est celle des Juifs, après la destruction de Jérusalem en 70 après le Christ et l’interdit romain les empêchant d’y résider. Les peuples vivant en diaspora sont supposés garder un lien sentimental fort avec leur terre d’origine et avoir pour but d’y retourner. Longtemps, l’emploi de ce terme a été réservé aux Juifs et aux Arméniens, voire aux Chinois. Plus récemment, il a été étendu à d’autres groupes nationaux, de façon plus ou moins justifiée.

Invasion du latin in (dans/contre) vadere, entrer énergiquement désigne l’arrivée et l’occupation massive d’un territoire habité, en s’y introduisant de manière soudaine et brutale, provoquant le renversement de l’ordre établi et pouvant aller jusqu’au remplacement de la population autochtone. L’invasion peut également viser la soumission d’un peuple et l’imposition d’une allégeance, sans installation de peuplement.

Colonisation du verbe latin colo, cultiver exprime l’installation de populations parties pour cultiver et rendre habitables (de leur point de vue) des territoires potentiellement riches, en maintenant des liens forts avec la métropole, en y important la législation et les coutumes de cette dernière, sans égard pour les droits des populations indigènes éventuellement résidentes.

Cosmopolite du grec cosmos, monde/univers, et polites, citoyen (= citoyen du monde, expression des disciples de la philosophie stoïque) est un adjectif qui désigne des lieux où cohabitent des personnes provenant d’horizons divers, habituées à cette diversité jusqu’à produire une culture conciliant des éléments variés.

Traite (des êtres humains) du latin trahere, tirer, et de ses dérivés utilisés ensuite dans le double sens d’enlèvement et de commerce évoque historiquement l’enlèvement et le commerce d’esclaves noirsQK, et se réfère en général à la réduction violente de certaines personnes au statut de marchandises en vue d’une exploitation dégradante de leurs corps, en les enlevant de leurs lieux d’origine pour les vendre ailleurs.

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